Un nouveau chapitre s'ouvre pour Lazare Razkallah, après 36 ans chez TUI France. Le 2 février dernier, il fêtait son départ avec 100 de ses collègues et même Jacques Maillot - DR : LinkedIn, Lazare Razkallah
« Je suis un peu comme la Reine d'Angleterre, j'en ai vu passer des présidents et des DRH, j'ai vu tous les styles », s'amuse Lazare Razkallah après 36 années de bons et loyaux services chez TUI France.
Le 2 février dernier, il organisait, avec deux autres collègues, son pot de départ, avec en guest star Jacques Maillot himself, le fondateur de Nouvelles Frontières.
« Il a passé son temps à faire des photos avec tous les salariés, raconte Lazare Razkallah, très honoré que le président-fondateur soit venu. C'était un bel hommage et c'était émouvant, il y avait des salariés en pleurs ».
Lazare, lui, part la conscience tranquille et « heureux » à l'heure de faire le bilan sur son parcours professionnel.
Son BTS en poche, il est entré chez Nouvelles Frontières en 1987 (boulevard de Grenelle) au service remboursements/réclamations, puis a occupé différents postes, notamment au support applicatif informatique mais aussi à la supervision de la boutique du CSE, l'agence de voyages interne pour les salariés.
Le 2 février dernier, il organisait, avec deux autres collègues, son pot de départ, avec en guest star Jacques Maillot himself, le fondateur de Nouvelles Frontières.
« Il a passé son temps à faire des photos avec tous les salariés, raconte Lazare Razkallah, très honoré que le président-fondateur soit venu. C'était un bel hommage et c'était émouvant, il y avait des salariés en pleurs ».
Lazare, lui, part la conscience tranquille et « heureux » à l'heure de faire le bilan sur son parcours professionnel.
Son BTS en poche, il est entré chez Nouvelles Frontières en 1987 (boulevard de Grenelle) au service remboursements/réclamations, puis a occupé différents postes, notamment au support applicatif informatique mais aussi à la supervision de la boutique du CSE, l'agence de voyages interne pour les salariés.
Vingt ans de délégation et de représentation des salariés
Mais c'est par son statut de secrétaire du CSE (Comité social et économique) - ou du CE (comite d'entreprise) à l'époque - qu'on le connaît le mieux... en tous cas à l'extérieur de TUI France.
Également élu CGT, il a effectué vingt ans de délégation et de représentation des salariés au sein de TUI France. « L'un des moments les plus marquants de mon parcours s'est produit au tout début de ma première année de délégation, se souvient-il.
J'ai été nommé secrétaire du CE en juillet 2002 et en août, on nous annonce le premier plan social chez Nouvelles Frontières. En plein été !
Il y avait de nouveaux élus et nous étions tous impressionnés et surtout pas prêts. A la direction, il y avait Ralf Corsten, Jacques Maillot n'était plus aux manettes. Et je ne le connaissais pas, c'était impressionnant !
Comme nous n'étions pas d'accord pour que cette première réunion se tienne au mois d'août, le plan était que je lise une déclaration, que je lève la séance et qu'on parte. Donc j'ai lu mon texte et j'ai invité tous les élus à quitter la salle et nous avons laissé la direction en plan. Je me suis dit à ce moment-là que secrétaire de CE, c'était terrible ! »
Des anecdotes et des souvenirs, Lazare Razkallah en a plein les tiroirs. Des bons avec les salariés, les camarades du CSE. « TUI reste une famille pour moi. Ma femme, mon frère et même ma fille y travaillent ! », ajoute-t-il.
« Et puis, avec les fusions-absorptions, j'ai rencontré de nouveaux collègues, ex-Marmara, Passion des Îles, Transat... Ça enrichit l'entreprise, toutes ces sensibilités, ces visions, ces savoir-faire différents ».
Également élu CGT, il a effectué vingt ans de délégation et de représentation des salariés au sein de TUI France. « L'un des moments les plus marquants de mon parcours s'est produit au tout début de ma première année de délégation, se souvient-il.
J'ai été nommé secrétaire du CE en juillet 2002 et en août, on nous annonce le premier plan social chez Nouvelles Frontières. En plein été !
Il y avait de nouveaux élus et nous étions tous impressionnés et surtout pas prêts. A la direction, il y avait Ralf Corsten, Jacques Maillot n'était plus aux manettes. Et je ne le connaissais pas, c'était impressionnant !
Comme nous n'étions pas d'accord pour que cette première réunion se tienne au mois d'août, le plan était que je lise une déclaration, que je lève la séance et qu'on parte. Donc j'ai lu mon texte et j'ai invité tous les élus à quitter la salle et nous avons laissé la direction en plan. Je me suis dit à ce moment-là que secrétaire de CE, c'était terrible ! »
Des anecdotes et des souvenirs, Lazare Razkallah en a plein les tiroirs. Des bons avec les salariés, les camarades du CSE. « TUI reste une famille pour moi. Ma femme, mon frère et même ma fille y travaillent ! », ajoute-t-il.
« Et puis, avec les fusions-absorptions, j'ai rencontré de nouveaux collègues, ex-Marmara, Passion des Îles, Transat... Ça enrichit l'entreprise, toutes ces sensibilités, ces visions, ces savoir-faire différents ».
Quand les salariés étaient licenciés par visioconférence...
D'autres souvenirs restent plus difficiles, comme lors du dernier plan social de TUI France.
« Sur les quelque 80 000 salariés que comptait le Groupe TUI, le plan social touchait 10% des effectifs au global, mais en France, ce sont 2 postes sur 3 qui ont été supprimés. Mais le pire c'est de savoir que tous ces salariés ont appris leur licenciement par visioconférence !, rappelle Lazare Razkallah.
On leur a envoyé un lien et ils vont vu apparaître le visage du PDG de l'époque, Hans Van de Velde, bloqué au Maroc, qui leur annonçait la nouvelle sans la moindre empathie, ni aucune bienveillance. Même si les salariés étaient à ce moment-là en chômage partiel, il aurait pu au moins venir au siège, plutôt que de le faire en visioconférence, ça a choqué les salariés.
Finalement, c'est la forme avec laquelle il a procédé qui m'a donné la force de me battre et de porter jusqu'au bout cette action pour faire annuler le PSE ! », relate Lazare Razkallah.
Et les efforts ont payé puisque les salariés ont obtenu gain de cause et que le Plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) a été annulé par la justice. « Mais la décision de justice est arrivée trop tard, regrette l'ancien secrétaire général.
A peine une quinzaine de salariés ont pu être réintégrés (au back office opérations ou services à destination, etc.) mais les agences étaient déjà fermées. C'est bien dommage, parce que les agences intégrées, qui étaient au contact des clients, étaient le pouls de l'entreprise et je trouve que cela manque », confie Lazare Razkallah.
LIRE AUSSI : EXCLUSIF - Hervé Vighier : "TUI France est un gâchis sur le plan humain et financier !"
« Sur les quelque 80 000 salariés que comptait le Groupe TUI, le plan social touchait 10% des effectifs au global, mais en France, ce sont 2 postes sur 3 qui ont été supprimés. Mais le pire c'est de savoir que tous ces salariés ont appris leur licenciement par visioconférence !, rappelle Lazare Razkallah.
On leur a envoyé un lien et ils vont vu apparaître le visage du PDG de l'époque, Hans Van de Velde, bloqué au Maroc, qui leur annonçait la nouvelle sans la moindre empathie, ni aucune bienveillance. Même si les salariés étaient à ce moment-là en chômage partiel, il aurait pu au moins venir au siège, plutôt que de le faire en visioconférence, ça a choqué les salariés.
Finalement, c'est la forme avec laquelle il a procédé qui m'a donné la force de me battre et de porter jusqu'au bout cette action pour faire annuler le PSE ! », relate Lazare Razkallah.
Et les efforts ont payé puisque les salariés ont obtenu gain de cause et que le Plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) a été annulé par la justice. « Mais la décision de justice est arrivée trop tard, regrette l'ancien secrétaire général.
A peine une quinzaine de salariés ont pu être réintégrés (au back office opérations ou services à destination, etc.) mais les agences étaient déjà fermées. C'est bien dommage, parce que les agences intégrées, qui étaient au contact des clients, étaient le pouls de l'entreprise et je trouve que cela manque », confie Lazare Razkallah.
LIRE AUSSI : EXCLUSIF - Hervé Vighier : "TUI France est un gâchis sur le plan humain et financier !"
300 dossiers aux Prud'hommes de Nanterre
Aujourd'hui, TUI France se prépare à une vague de procès aux Prud'hommes de la part de ses anciens salariés. « Sur les quelque 560 personnes licenciées, il y a 300 dossiers aux Prud'hommes de Nanterre, dont d'anciens membres de la direction qui ont eux-mêmes écrit le plan ! », souligne Lazare Razkallah.
Tous attaquent TUI France pour licenciement abusif étant donné que le PSE a été « effacé » de par son annulation et celle de l'homologation de la Direccte.
Pour les employés et les maîtrises, l'audience est fixée au 2 mai 2024, et au 20 mai 2025 pour les cadres. TUI France aurait déjà provisionné 30 M€ pour faire face aux condamnations éventuelles.
« Même les pouvoirs publics n'ont pas été sympathiques avec nous durant cette période, renchérit Lazare Razkallah. Alors que les frontières se fermaient, au début de la pandémie, nous avons rencontré un représentant du cabinet de Bruno Le Maire qui nous avait dit de ne pas nous inquiéter, que le chômage partiel était fait pour aider les entreprises et éviter les licenciements.
Et TUI France a touché près de 30 M€ d'aides pendant cette période, dont 10 M€ du CICE (Crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi). Mais quand nous avons revu ce même conseiller en visio quelques mois plus tard, il nous a dit à propos du PSE que nous nous en sortions bien, parce que nous évitions la liquidation judiciaire dans un contexte où plus aucun vol ne décollait et où les hôtels étaient vides...
Idem au Ministère du Travail où les représentants de Mme Borne ne nous ont pas apporté leur aide quand nous leur disions que nous avions été licenciés en visioconférence et que nous avions l'impression d'être aux Etats-Unis chez Uber..., témoigne Lazare Razkallah.
Nous n'avons pas trouvé d'aide, ni d'écoute, mais nous nous sommes battus avec les salariés, notre avocat, notre expert ».
Tous attaquent TUI France pour licenciement abusif étant donné que le PSE a été « effacé » de par son annulation et celle de l'homologation de la Direccte.
Pour les employés et les maîtrises, l'audience est fixée au 2 mai 2024, et au 20 mai 2025 pour les cadres. TUI France aurait déjà provisionné 30 M€ pour faire face aux condamnations éventuelles.
« Même les pouvoirs publics n'ont pas été sympathiques avec nous durant cette période, renchérit Lazare Razkallah. Alors que les frontières se fermaient, au début de la pandémie, nous avons rencontré un représentant du cabinet de Bruno Le Maire qui nous avait dit de ne pas nous inquiéter, que le chômage partiel était fait pour aider les entreprises et éviter les licenciements.
Et TUI France a touché près de 30 M€ d'aides pendant cette période, dont 10 M€ du CICE (Crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi). Mais quand nous avons revu ce même conseiller en visio quelques mois plus tard, il nous a dit à propos du PSE que nous nous en sortions bien, parce que nous évitions la liquidation judiciaire dans un contexte où plus aucun vol ne décollait et où les hôtels étaient vides...
Idem au Ministère du Travail où les représentants de Mme Borne ne nous ont pas apporté leur aide quand nous leur disions que nous avions été licenciés en visioconférence et que nous avions l'impression d'être aux Etats-Unis chez Uber..., témoigne Lazare Razkallah.
Nous n'avons pas trouvé d'aide, ni d'écoute, mais nous nous sommes battus avec les salariés, notre avocat, notre expert ».
Près de 2 000 collègues partis en 20 ans
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De son côté, Lazare Razkallah comparaîtra devant le Tribunal correctionnel de Nanterre avec 7 autres salariés pour injure et diffamation, suite à leur manifestation devant le siège de la Direccte, en janvier 2021.
« C'était avant l'annulation du plan social et nous voulions leur dire tout le mal qu'on pensait d'eux et dénoncer la forme de collusion que nous avions ressenti entre eux et notre direction de l'époque. Ils ne nous écoutaient pas, ils ne nous entendaient pas quand nous leur remontions des faits qui n'étaient pas conformes au Code du Travail. Par contre, ils remontaient tous nos agissements à la direction de TUI », se souvient Lazare Razkallah, qui leur reproche encore leur manque d'impartialité.
« La preuve en est : la justice nous a donné raison. Et d'ailleurs, si le Conseil d’État le confirme, je pense qu'il y aura une jurisprudence concernant ces problèmes juridiques, notamment sur les « zones d'emploi » dans les agences ».
La date du procès en correctionnelle, quant à elle, n'est pas encore connue.
Ainsi, s'il quitte ses fonctions au sein de TUI France et compte faire valoir ses droits à la retraite prochainement, Lazare Razkallah défendra encore son action en tant que défenseur des droits des salariés devant les tribunaux, mais pas que...
Il envisage également de travailler en tant que consultant pour des cabinets d'expertise afin de former les élus. « J'ai appris beaucoup de choses en 20 ans : travailler avec des cabinets d'expertise comptable, comprendre les budgets du CSE, parler à des ministres, aller à la Direccte... Je compte leur apporter des éléments concrets, pas de la théorie », ajoute-t-il.
C'est sûr, après vingt ans de délégation, il a eu le temps de cumuler de l'expérience et de peaufiner sa méthode. « Je pense qu'un bon secrétaire général de CSE doit bien s'entendre avec tout le monde, syndicats comme direction. Il faut savoir maintenir le dialogue même si les relations sont au plus mal, et toujours laisser la porte entrouverte.
Il faut aussi savoir prendre des risques, des initiatives, ne pas avoir peur des pressions. Le CSE ne doit pas non plus être vu comme une secte où tout reste à huis clos, il faut dire aux salariés ce qui se dit en réunion ».
Depuis sa prise de fonction en 2002, Lazare Razkallah aura vu partir près de 2 000 collègues suite aux plans sociaux successifs. « Des sommes considérables ont été balancées. J'ai fait le calcul, le Groupe TUI a dépensé près de 1,5 milliard d'euros depuis le rachat de Nouvelles Frontières entre les plans sociaux, les budgets de réorganisation qui parfois ne menaient à rien... », indique-t-il.
Aujourd'hui, il part tout de même plus serein, ravi de voir d'un côté que la CGT reste majoritaire au sein du CSE (8 sièges sur 13) suite aux dernières élections, mais aussi que le dialogue social a été réinstauré au sein de TUI France et que le Groupe est pratiquement à l'équilibre.
LIRE AUSSI : Production, services, organisation interne : quel visage pour le nouveau TUI France ? 🔑
Reste donc à savoir qui va lui succéder au poste de secrétaire du CSE...
« C'était avant l'annulation du plan social et nous voulions leur dire tout le mal qu'on pensait d'eux et dénoncer la forme de collusion que nous avions ressenti entre eux et notre direction de l'époque. Ils ne nous écoutaient pas, ils ne nous entendaient pas quand nous leur remontions des faits qui n'étaient pas conformes au Code du Travail. Par contre, ils remontaient tous nos agissements à la direction de TUI », se souvient Lazare Razkallah, qui leur reproche encore leur manque d'impartialité.
« La preuve en est : la justice nous a donné raison. Et d'ailleurs, si le Conseil d’État le confirme, je pense qu'il y aura une jurisprudence concernant ces problèmes juridiques, notamment sur les « zones d'emploi » dans les agences ».
La date du procès en correctionnelle, quant à elle, n'est pas encore connue.
Ainsi, s'il quitte ses fonctions au sein de TUI France et compte faire valoir ses droits à la retraite prochainement, Lazare Razkallah défendra encore son action en tant que défenseur des droits des salariés devant les tribunaux, mais pas que...
Il envisage également de travailler en tant que consultant pour des cabinets d'expertise afin de former les élus. « J'ai appris beaucoup de choses en 20 ans : travailler avec des cabinets d'expertise comptable, comprendre les budgets du CSE, parler à des ministres, aller à la Direccte... Je compte leur apporter des éléments concrets, pas de la théorie », ajoute-t-il.
C'est sûr, après vingt ans de délégation, il a eu le temps de cumuler de l'expérience et de peaufiner sa méthode. « Je pense qu'un bon secrétaire général de CSE doit bien s'entendre avec tout le monde, syndicats comme direction. Il faut savoir maintenir le dialogue même si les relations sont au plus mal, et toujours laisser la porte entrouverte.
Il faut aussi savoir prendre des risques, des initiatives, ne pas avoir peur des pressions. Le CSE ne doit pas non plus être vu comme une secte où tout reste à huis clos, il faut dire aux salariés ce qui se dit en réunion ».
Depuis sa prise de fonction en 2002, Lazare Razkallah aura vu partir près de 2 000 collègues suite aux plans sociaux successifs. « Des sommes considérables ont été balancées. J'ai fait le calcul, le Groupe TUI a dépensé près de 1,5 milliard d'euros depuis le rachat de Nouvelles Frontières entre les plans sociaux, les budgets de réorganisation qui parfois ne menaient à rien... », indique-t-il.
Aujourd'hui, il part tout de même plus serein, ravi de voir d'un côté que la CGT reste majoritaire au sein du CSE (8 sièges sur 13) suite aux dernières élections, mais aussi que le dialogue social a été réinstauré au sein de TUI France et que le Groupe est pratiquement à l'équilibre.
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Reste donc à savoir qui va lui succéder au poste de secrétaire du CSE...